JUILLET 2023
 
 
CONTENU
  1. Le littoral du Centre Vietnam : entre baies, lagunes, promontoires, îles et plages au sable blanc.

  2. La statuaire khmère : une petite digression.

  3. À propos des marais mésopotamiens.
ANNONCE
  1. Nous sommes heureux d’accueillir le Prof. Jean-Michel Filippi. Il appuiera l’équipe éditoriale de Secret Indochina via des sujets concernant l’art et l’histoire khmère, le vieux Hanoi, Saigon la perle de l'Orient, la linguistique vietnamienne et d’autres sujets envoûtants.

  2. Durant les « années Covid », en parallèle d’études sur la production en Asie du Sud-Est, Secret Indochina étend ses recherches et son expertise vers l’Asie du Sud-Ouest. Deux régions culturellement liées via les voies maritimes longeant le littoral persan, le golfe arabo-persique, l’océan indien et le Pacifique : de Sumer à Angkor, puis vers le Funan et le Champa. 

    À l’instar des recherches de Secret Indochina et dans l’esprit de son concept de « Last Frontiers », l’approche est d’aborder l’invisible ou le non-vu, de rentrer en des espaces méconnus, en des contrées reculées, oubliées, de les mettre en exergue et d’en honorer la vénérable mémoire. Le long d’un axe s’étendant globalement entre l’Arabie et le sud-est de la Perse. Entre le royaume nabatéen, la Mésopotamie, l’Elam, la Gédrosie et la Carmanie ; à travers diverses entités dont des cités-antiques, des déserts, des steppes, des djebels, des wadis, des oasis, des marais, des littoraux-sableux et des îles-enchanteresses.

    Nous commençons par les légendaires marais mésopotamiens.

    Nos meilleures salutations,

    L’équipe éditoriale de Secret Indochina.

Illustration de Henri Mège
LE LITTORAL DU CENTRE VIETNAM
ENTRE BAIES, LAGUNES, PROMONTOIRES, ÎLES ET PLAGES DE SABLE BLANC
 
 
En cette édition, nous revenons vers le littoral du Vietnam, en l’occurrence sa partie centrale, entre les provinces de Ha Tinh et de Quang Nam. Un superbe ensemble de baies, de lagunes, de promontoires, d’îles, de plages ventées, de bois de cocotiers, de villages de pêcheurs, de ruines chame et de vieux ports dont celui de la célébrée Hoi An.

La partie septentrionale du littoral de l’ancien centre Annam est délimité par le cap Mui Ron Me (Ma) et par l’estuaire de la rivière Cua Khua, vers le large apparaissent les îles de Hon Son Duong et de Con Chim ; plus bas s’étend l’embouchure de la rivière Song Gianh, cours méandreux prenant sa source dans les hauteurs brumeuses du massif de Ke Bang (Phong Nha).

Au niveau de Dong Hoi, la chaîne annamitique se rapproche du littoral qui a ce niveau est longé par le cours de la rivière Kien Giang et par de petites arrières-campagnes bucoliques. Ensuite, ce jusqu’au 17 ième parallèle (l’ancienne zone démilitarisée), ce sont de longues plages de sable blanc et des lagunes d’où émergent des villages de pêcheurs dominés au sud par le cap Mui Lay, la localisation des célèbres tunnels de Vinh Moc. Au sud de celui-ci, apparaît une autre grande étendue sablonneuse, coupée par l’embouchure de la rivière Cua Viet, voisinant la ville de Quang Tri.

En arrivant au niveau de Hué, l’ancienne capitale impériale, le littoral se caractérise par un ensemble de lagunes (Tam Giang, « les trois rivières »), qui avec leurs alimentations sinueuses caractérisent la région : une contrée particulière formée d’estuaires, d’embouchures, de marais, de mangroves, de viviers, de salines et de petits ports venteux.

Techniquement, les lagunes s’étendent sur une cinquantaine de kms de long, pour quatre au plus large ; elles se divisent en deux parties : la lagune de l’Ouest (Pha Tam Giang) et la lagune de l’Est (Da Ham Trung & Dam Thuy Tu) ; au sud elles alimentent la baie de Dam Cau Hai. Entre les lagunes et l’océan se forme une bande sableuse où perdurent des villages de pêcheurs, les principaux étant Thai Duong Ha, Cu Lai, My Quan et Hien Ha (Hien An) tout au sud. Vers l’ouest, les lagunes bordent les faubourgs de Hué et les embouchures de trois cours qui les alimentent : le Song Bo, le Song Lau et le légendaire Song Huong (la rivière des Parfums).

Les trois cent mille pêcheurs de la lagune y adaptent leurs techniques, notamment via d’immenses réseaux de filets et divers pièges, disposés selon le grès des marées ou des saisons Illustration Hoi An ; leurs pirogues y sont plus longues et plus recourbées ; de loin, elles ressemblent à des feuilles de bambou flottant sur l’eau, cette caractéristique permettant de parfois mieux passer les hautes barres de l’océan. Aux 17ème et 18ème siècles, à l’époque des seigneurs Nguyen, la lagune forme une protection naturelle et défend l’accès oriental de la citadelle de Hué. Des combats acharnés s’y déroulent durant la guerre du Vietnam, particulièrement en 1968 ; par la suite, les lagunes sont des « points de départ » pour des boat-people fuyant le nouveau régime.

Le sud des lagunes se continue par la baie de Chon May, au pied du cap Mui Chan May Dong, un prolongement maritime de la chaîne annamitique dont le sommet, le Dong Nhut culmine à 585 m. Au sud de cette formation apparaissent la lagune et la plage de Vung An Cu, plus connue sous le nom de Lang Co ; la baie se ferme par une péninsule boisée et par une île coiffée d’un phare (Hon Son Cha).

Son versant méridional domine la baie de Tourane (Vinh Da Nang), elle-même fermée par la presqu’île de Son Tra, un site classé en réserve naturelle, dominée par le mont éponyme (693 m) et où abondent les langurs. Son Tra se prolonge par une deuxième petite presqu’île (Tiensha ou Mui Da Nang) et son phare ; le sud de la péninsule se distingue par son cap rocheux : la « pointe du lutin ». Vers le sud-ouest, se trouvent les vestiges d’un ancien cimetière français et de sa petite chapelle (Y Pha Nho) et les vestiges d’une ancienne base américaine (Monkey Mountain camp).

Au sud, se déploient de majestueuses plages de sable blanc, ce jusqu’à Hoi An (Faifo ou Phai Pho) et l’estuaire de la Song Thu Bon. Cette région, voisinant My Son, la capitale chame, possède de nombreuses ruines, des tours ou des sanctuaires, notamment vers le village de Qua Giang, à Bo Mung, édifié en 889 sous le roi Indravarman (au km 21 au sud de Danang) et à Tra Kieu (la légendaire capitale de Sinhapura).

Au large émerge un chapelet d’îles paradisiaques dont Hon Chu (Cu), Hon Co (Ca), Hon Cu Lao Cham, Hon Mo et Hon Tai.

La Song Cua Dai, en sa partie finale est rejointe par le Song Truong Giang. La partie basse de celui-ci a un cours particulier, puisque mi lagune – mi rivière, il longe la grande plage méridionale de Hoi An, ce sur une cinquantaine de kms, au bout desquels se forme la lagune de Truong Giang et se profile la baie de Vung Dung Quat, la pointe de De Vian Ka (Mui Tui) et finalement le cap Nam Tram (Nui Nam Cham, km 138). Divers groupes de tours chame se trouvent dans l’arrière-pays de cette zone, notamment le groupe de Khuong Mi et Chiang Dang.

Le littoral méridional de Quang Ngai se constitue de longues plages blanches sur environ cinquante kms ; elles sont traversées par endroits d’embouchures, les principales étant celles du Song Tra Khuc et du Song Ve. Au niveau de Phu Khuong (Thuy Thach), la bande côtière se resserre, les contreforts de la chaîne sud-annamitique se rapprochent, conférant un aspect plus dramatique au littoral. S’y forme une série de baies et de petites péninsules sableuses, jusqu’au delta de la rivière Song Lai Giang, au niveau de Bong Son (Hoai An). Bong Son est établie en 1471 par le roi Le Thanh Tong et devient l'un des trois centres administratifs de l'actuelle province de Binh Dinh. En 1945, le bourg est le théâtre d'un soulèvement contre les Français, mouvement impliquant environ huit mille personnes dirigées par Trinh Hong Ky. Pendant la guerre du Vietnam, le secteur est sujet à de sévères combats, particulièrement en 1968.

Dam Tra O, une autre baie, se forme au sud de Bong Son, au large apparaît l’île de la Tortue ; puis le relief s’élève brusquement via les monts Nui Mieu (518 m) et Nui Trop Tre, imposants édifices dont les contreforts sud-est bordent la baie de Nuoc Ngot. Sa partie septentrionale est protégée par une admirable péninsule sableuse et ventée au bout de laquelle se localise Vinh Loi, un vieux village de pêcheurs, avec ses bois de cocotiers et ses salines. En face émerge l’île aux buffles (Hon Con Trau), un atoll rocailleux battu par les typhons du Pacifique.Carte

Le littoral se prolonge par une longue étendue sableuse, ce jusqu’à la presqu’île fermant le nord de la baie de Lang Mai (Quy Nhon). S’y distinguent les tours du Bang Chau, une ancienne capitale chame, connue pour ses « Tours d’or, Tours de cuivre et les Tours d’argent ».

À vingt-six kms au sud de Quy Nhon, c’est Cha Ban, une capitale du Champa ; frontière septentrionale de la région de la « côte des Palmes », une autre invitation au voyage sur laquelle nous reviendrons…


© Crédit illustration : Henri Mège

 
 
LA STATUAIRE KHMÈRE
UNE PETITE DIGRESSION
 
Apsara
Une visite du musée national à Phnom Penh ou du musée Guimet, qui fête ses 100 ans en 2023, nous convaincra facilement de l’importance de la statuaire khmère.

Pendant plus d’un siècle, il fut de mode de parler d’art hindou, indien ou encore indianisé pour évoquer et la statuaire et ces forêts de temples que les bâtisseurs khmers nous ont légués. On fit alors mine d’oublier que les fameux temples montagnes, traduction d’un aspect essentiel du Dharma hindou, n’ont pas été érigés en Inde mais au Cambodge. Et pourtant ce n’est pas faute d’avoir été prévenu, entre autres par Tagore : « Je vois l’Inde partout, mais ne la reconnais pas ».

Et si le monde khmer avait réinventé l’Inde ? Une question qui mérite d’être posée quand des dieux indiens s’incarnent en une statuaire dont les formes n’ont pas d’équivalents en Inde.

Les noms des dieux sont bien indiens, mais l’identité s’arrête là car les visages sont khmers : dès l’origine, les commissures des lèvres légèrement ascendantes et des yeux en amandes à l’iris saillant dessinent une ébauche de sourire qui, précision essentielle, semble rétive à toute émotion.

Les formes corporelles situent cette statuaire dans un monde de retenue très loin de l’exubérance hindoue : de légers hanchements voués à disparaître et combinés à un affadissement progressif du réalisme anatomique finiront par traduire le corps des dieux en des formes de plus en plus stylisées. Nous voilà désormais dans un univers où la sensualité est soumise à un codage strict.

Peut-on pour autant parler d’austérité ? Loin de là car, si les sculpteurs khmers éloignent les corps des dieux de l’humanité, ils vont aussi, et paradoxalement, rivaliser d’ingéniosité pour humaniser la représentation : radiance des plis du vêtement, tension qui laisse pressentir des mouvements à peine perceptibles, superbes ceintures…

Un dernier point sera d’une importance primordiale. La représentation statuaire comprend généralement des hauts reliefs, des statues avec appuis et des statues en ronde-bosse. Ainsi, dans le monde indien proprement dit, le haut relief est à l’honneur pour des raisons évidentes : il s’agit de représenter les épisodes de la vie des dieux, querelles, amours… alors qu’une statue sur appuis ou une ronde-bosse symbolisera une divinité coupée de son environnement mythologique pour mieux mettre en valeur ses attributs caractéristiques.

Dans les royaumes Cham, voisins de l’empire khmer, le haut relief est également prépondérant.

Le monde khmer, quant à lui, rejette catégoriquement, dès l’origine, le haut relief à moins que la scène à représenter ne le rende nécessaire ; ainsi, Krishna soulevant le mont Govardhana est le seul motif en haut relief au Cambodge. Dans « statue », il y a l’idée de se tenir que l’on retrouve dans station, stable… donc le thème d’une saillance et, pour les khmers, c’est précisément cette saillance que la statuaire doit affirmer ; dans cette perspective, l’individualité de la statue ne pouvait être compatible avec le support d’un mur.

De fait, l’histoire de la sculpture khmère est le résultat d’un long parcours qui va lentement l’affranchir des appuis pour réaliser des statues en ronde-bosse, le comble d’une statuaire digne de ce nom !

                           

À PROPOS DES MARAIS
MÉSOPOTAMIENS
 
Les marais
La région des marais mésopotamiens est une contrée lacustre située entre le sud-est de l'Irak et le sud-ouest de l'Iran. Elle constitue le plus grand écosystème lacustre d'Eurasie occidentale. Les marais couvrent autrefois plus de quinze mille km2, soit une superficie près de deux fois supérieure à celle des Everglades d'origine. Les marais mésopotamiens sont parfois nommés « Jardin d'Eden ».

L’esprit des marais est ainsi décrit par Sir W. Thesiger : … la lumière du feu sur un visage à demi tourné, le cri des oies, le vol des canards, la voix d'un garçon qui chante quelque part dans l'obscurité, des canoës qui descendent en procession le long d'un cours d'eau, le soleil couchant cramoisi à travers la fumée des roseaux en feu, d'étroites voies d'eau qui s'enfoncent encore plus profondément dans les marais. Un homme nu dans un canoë, un trident à la main, des maisons de roseaux construites sur l'eau, le coassement des grenouilles, les canoës rentrant chez eux le soir, la paix et la continuité, le calme d'un monde qui n'a jamais connu de moteur (W. Thesiger, the Marsh Arabs, 1964).

La région des marais est le pays du « peuple des roseaux », également connu sous le nom de Arabes des Marais (Marsh Arabs) ou de Madan. Ils sont organisés en confédérations ou groupes, les plus notables étant les Madan au centre, les Al Bu Muhammad au nord, les Muntifi au sud-ouest, les Bassad au sud et les Shadda vers l’est et la frontière iranienne. La majorité sont des musulmans shi’a (Chiite).

Le « peuple des roseaux » vit dans des maisons en roseaux voûtées d’une taille moyenne d’un peu plus de deux mètres de large pour environ six mètres de long et un peu moins de trois mètres de haut ; construites soit au bord de l'eau, soit sur des îles artificielles de roseaux, les kibasha ou les dibin. Les maisonnées sont pourvues de deux entrées aux deux extrémités ; une extrémité est utilisée comme habitation et l'autre, la sitra, sert à abriter les animaux par mauvais temps. Les embarcations traditionnelles, le mashoof et le tarada, sont utilisées comme moyen de transport et tout un réseau de voies fluviales parsèment les marais.

En 1984, les marais sont le théâtre de la « bataille des marais », engagement sanguinolent de la guerre Irak-Iran. L'Iran lance une offensive amphibie surprise dans le marais de Hawizeh (nord des marais), s’en suit une série d’offensives et de contre-offensives. Les Irakiens utilisent l’artillerie, les chars, les frappes aériennes, des canonnières et des hélicoptères de combat pour repousser les forces iraniennes à travers les marécages, environ quarante mille Iraniens meurent au cours des combats. Les Iraniens utilisent également des opérations combinées par hélicoptère, canonnières et speed-boats, dans le cadre des opérations Fatima al-Zahra et Kheibar.Illustration de Ahoar Anasryh

Entre les années 1950 et 1990, les marais sont asséchés, à des fins agricoles, pour l’exploitation pétrolière et pour en expulser les arabes chiites. Les marais se retrouvent asséchés à 10 % de leur surface d'origine ; en 2003, après la chute du régime de Saddam Hussein, ils se reconstituent partiellement, mais la sécheresse ainsi que la construction et l'exploitation de barrages en amont du Tigre et de l’Euphrate entravent le processus. En 2016, les marais sont inscrits au patrimoine de l'UNESCO.

Les marais mésopotamiens sont désormais divisés en quatre zones distinctes : les marais septentrionaux d’Al Hawizeh (l’ancien marais de Samargha), les marais centraux d’Abou Kelam, les marais méridionaux d’Al Hammar et les marais iraniens de Hawizech (l’Hur al Azim).

La zone nord recouvre le marais d’Hawizeh, (les anciens marais de Samargha et de Samirda), une étendue lacustre transfrontalière, centrée sur le bas Tigre avant son confluant avec l'Euphrate à Basra.

Dans les marais, les principaux végétaux sont le roseau commun ou roseau à balais (Phragmites australis, la sagne), le scripe (Schoenoplectus), le cornifle immergé (Ceratophllum demersum), le myriophylle verticillé (Myriophyllum verticillatum), le potamot à feuilles pectinées (Stuckenia pectinata), le qat (Polygonum senegalense, un genre de jonc), le kauban (Jussiaea diffusa), le lisan al thaur (Potomogeton lucens) et le sijal (Cyperus rotundus, le souchet rond ou herbe-coco).

La zone des marais d’Hawizeh est un site de biodiversité d'importance prioritaire pour la conservation, abritant des espèces menacées telles que le phragmite des roseaux (A. crocephalus griseldis), la tortue molle de l'Euphrate (Rafetus euphraticus) et la loutre à poil lisse (Lutrogale perspicillata maxwelli). Y évoluent plus de quarante espèces qui s'y reproduisent en été et plus de quatre-vingt-dix espèces y hivernant. La zone est un site de récupération et d'alimentation pour les migrateurs de passage entre la Sibérie occidentale, l’Asie centrale et l'Afrique. Avant les années 1930-1950 les marais sont le repère du loup gris (Canis lupus), du renard roux (Vulpes vulpes ou renard rouge), du chacal doré (Canis aureus) et de la hyène rayée (Hyaena hyaena). Les principales espèces de poissons y sont le himri (Carasbarsus luteus), l’aspic du Tigre ou mésopotamien (Leuciscus vorax), le binni (Mesopotaichthys sharpeyi).

Le centre des marais, ou marécages d’Abou Kelam est une vaste contrée marécageuse s’étendant au nord-ouest du bas Tigre, au nord de la ville de Chibayish, sa partie septentrionale étant délimitée par celles de Mijar Al Kabir et de Qalat Salih. La contrée correspond autrefois au cœur des marais ; elle se compose de plusieurs marais, les plus notables étant le Hawr al Daymah, l’Al Binni, le Hawr al Zikri, le Hawr umm Jaraisha, le Hawr Juwawin, le Hawr Fatimah, et l’Hawr al Ruwaydah. Par endroits s’y forment des zones humides dominées par les roseaux (Phragmites australis) et formant parfois des zones nommées « rivière d'herbes ».

Historiquement, différents groupes d’Arabes des Marais peuplent le centre : les Al Bu Muhammad et les Feraigat se situent au nord, les Al Essa vers le nord-ouest, les Shadda vers l’ouest, les Madan et Shaghanba au centre, les Muntifi au sud-ouest, les Bassad, Bani Umair et Bani Assad au sud. Aujourd'hui, ils souffrent du réchauffement climatique et de leur « réinstallation » dans diverses villes bordant les marais.

Le marais central se distingue par le lac d’Al Binni. De 3,4 kms de diamètre, il pourrait être un cratère d'impact en se basant sur sa forme presque circulaire, la forme légèrement polygonale de son bord et sa forme contrastée par rapport aux autres lacs de la région. Le cratère est estimé à moins de 5000 ans, ou entre 2000 et 3000 av. J.-C. Certains associent ce site d'impact apparent à l'anomalie de 2350 av. J.-C. au Moyen-Orient : le déjuge. Un tsunami provoqué par l'impact aurait dévasté les villes sumériennes côtières, fait pouvant fournir une autre origine à la couche de sédiments de deux mètres soixante découverte lors de la fouille de la cité d'Ur par l’archéologue britannique Leonard Woolley (1922-1934). Des passages descriptifs de l'Épopée de Gilgamesh (1600-1800 av. J.-C.) pourraient décrire l’impact et le tsunami, suggérant un lien avec le déluge sumérien et plus tard le biblique.

...et les sept juges de l'enfer, les Annunaki, levèrent leurs torches, éclairant la terre de leur flamme livide. Une stupeur de désespoir monta au ciel quand le dieu de la tempête changea la lumière du jour en ténèbres, quand il écrasa la terre comme une coupe. Pendant tout un jour, la tempête fit rage, accumulant la fureur au fur et à mesure qu'elle avançait, elle se déversa sur le peuple comme des marées de bataille ; un homme ne pouvait pas voir son frère et le peuple ne pouvait pas être vu du ciel. Même les dieux furent terrifiés par le déluge, ils s'enfuirent au plus haut des cieux, le firmament d'Anu ; ils s'accroupirent contre les murs, recroquevillés comme des malédictions… (de l’épopée de Gilgamesh).

Le marais d’Al Hammar (Al Jaza’ir) constitue la partie méridionale des marais. Il est bordé au nord par le cours de l’Euphrate et au sud par le désert de Shamiyaha (une voie vers l’Arabie). Il se constitue de diverses étendues marécageuses s’étalant vers le Shatt el Arab (le confluent du Tigre et de l’Euphrate).

Divers espèces d’oiseaux y sont recensées, parmi elles : le busard des roseaux (Circus aeruginosus), le héron pourpre (Ardea purpurea), le héron cendré (Ardea cinerea), le grand cormoran (Phalacrocorax carbo), l'échasse blanche (Himantopus himantopus), l'aigrette garzette (Egretta garzetta), la mouette à tête noire ou mouette rieuse (Chroicocephalus ridibundus), le goéland cendré (Larus canus), la mouette commune, la sterne naine (Sternula albifrons), le grèbe castagneux (Tachybaptus ruficollis), le martin-pêcheur pie (Ceryle rudis), le martin-pêcheur à gorge blanche (Halcyon smyrnensis), la bergeronnette blanche et divers moineaux et passereaux. Les populations de poissons côtières du golfe persique utilisent les marais pour les migrations de frai, et les marais servent également de zones de reproduction pour les crevettes penaeides (Metapenaeae).

Au nord-est du marais méridional, se situent les ruines de Charax Spasinu, également connue sous les noms de Charax Spasinou, Charax Pasinu, Spasinu Charax, l’Antioche en Susiane, l’Alexandrie Antioche, ou la forteresse d'Hyspaosinès : un ancien port du golfe persique, la capitale du royaume de Characène (Mésène).

L’extrême sud-ouest de l’Iran forme la partie finale des marais mésopotamiens. Leur partie septentrionale est le prolongement des marais d’Hawizeh. Leur partie méridionale s’étend dans l’ancien Elam, autour des deltas de la rivière Karun et du Shatt al Arab. Pour d’autres renseignements, n’hésitez pas à nous contacter


© Crédit photo : Ahmed Abdul Amiralem.
© Crédit illustration : Ahoar Anasryh
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Carte satellite
© Image satellite des marais - NASA 2023
Secret Indochina
        Apsara illustration
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