JANVIER 2025
 
 
CONTENU
le douc à pattes rouges
LE DOUC À PATTES ROUGES
DE SON TRA
 
 
Au centre du Vietnam, dans la province de Quang Nam, se trouve Danang, la cinquième ville la plus peuplée du pays, qui se distingue par ses plages, ses péninsules, son histoire et ses merveilles naturelles.

Cette ville de plus d’un million d’habitant se situe à la limite d'une ceinture de plis paléozoïques connue sous le nom de zone orogénique de Truong Son et dont la principale déformation s'est produite au début de la période carbonifère. Vers l’ouest, la zone est dominée par les majestueux contreforts de la chaîne Annamite. Ses hauteurs se prolongent par des plaines côtières de faible altitude d’où apparaissent des rizières, des salines et vers l’est, des plages de sable blanc et la péninsule de Son Tra, le tout traversée par le Song Qua Giang.

Les origines de la ville remontent à l'ancien royaume cham de l’Indrapura dont des restes se situent à l'ancienne cité cham de Singhapura (la « Cité du Lion »), son emplacement correspond au village de Tra Kieu, non loin de la vallée de My Son, autre site remarquable du Champa. Sous la pression du Dai Viet, les Cham abandonnent l’Indrapura vers 1000 ap. J.-C. En 1847, des navires français envoyés par l'amiral Cécille bombardent Danang ; en août 1858, les troupes françaises, dirigées par l'amiral Charles Rigault de Genouilly et sous les ordres de Napoléon III, débarquent dans la baie de Danang. Les Français rebaptisent la ville Tourane, la plaçant sous le contrôle du gouverneur général de l'Indochine française. Pendant la guerre du Vietnam, Danang est une base majeure pour les forces sud-vietnamiennes et américaines. Le 30 mars 1975, la ville est prise par les forces nord-vietnamiennes.

Au sud de cette ville aujourd’hui en plein essor, se déploient de majestueuses plages de sable blanc, ce jusqu’à Hoi An (Faifo ou Phai Pho) et l’estuaire de la Song Thu Bon. Au nord, à environ dix kilomètres, pointe sous la forme d’un marteau levé, la réserve naturelle de Son Tra. Dominée par trois sommets (dont le plus haut, le mont Son Tra culmine à 693m), la "montagne des singes" - telle dénommée par les Américains lors de la seconde guerre d'Indochine - s’étend sur treize kilomètres de long pour six kilomètres de large, sur un ensemble de 4439 hectares. Elle est recouverte par 4180 hectares de forêt tropicale maritime, créant une sorte de paravent naturel contre les tempêtes. Ce poumon vert régulateur du climat local, abrite deux cent quatre-vingt-sept espèces de faune et de flore, dont vingt-neuf considérées comme rares, avec notamment le douc à pattes rouges (Pygathrix nemaeus), une espèce de primates de la famille des Cercopithecidae, appelée aussi "le singe aux cinq couleurs", "le singe costumé", "langur de Son Tra", ou "Reine des primates", taxon dont font partie aussi le Douc à pattes noires (P. nigripes) et le Douc à pattes grises (P. cinerea).

Aujourd’hui, la plus grande population à l’état sauvage de cette espèce native du Sud-Est Asiatique se situe dans l'est du Laos, dans les parcs nationaux presque contiguës de Nakai-Nam Theun NBCA et d’Hin Namno NBCA, avec une estimation de quatre mille cinq cents groupes d’individus pour le premier. Elle s’observe aussi dans la zone nationale de conservation de la biodiversité de Xe Xap, et vit probablement dans d’autres zones recluses du pays où les données sont manquantes. Au Cambodge, quelques individus furent observés en 2007 dans la province de Ratanakiri, tandis qu’au Vietnam, le peuplement (apparemment surestimé) serait d’environ deux mille individus dans le parc national de Phong Nha-Ke Bang, et d’un même nombre à Son Tra, en progression depuis le dernier recensement de 2017 qui comptabilise mille trois cent individus. Plus au sud, le parc national de Chu Mom Ray pourrait encore abriter quelques spécimens, représentant une zone possible de sympatrie et/ou d'hybridation, mais le statut taxonomique de l'espèce y est incertain.

Comme les autres doucs, Pygathrix nemaeus est un singe long et mince, qui mesure environ soixante cm avec une queue de cinquante-six à soixante-seize cm. Son pelage bariolé est gris sur le dos et le ventre ; noir sur ses cuisses, ses mains et ses pieds ; marron-rouge sur ses pattes ; et blanc sur sa queue et ses avant-bras. Sa face est ocre avec un nez blanc, ses paupières sont bleu-clair, son front noir, et ses joues et sa gorge blanches. Les mâles pèsent environ huit à onze kg, les femelles de six à dix kg.

Ce primate à l’apparence frappante et de nature timide, apprécie les forêts sempervirentes et semi-sempervirentes primaires et secondaires, les forêts de feuillus, les forêts mixtes de feuillus et de conifère, et les forêts karstiques sur une altitude pouvant osciller du niveau de la mer à environ 1700m d'altitude (et sans doute à des altitudes plus élevées). Diurne et arboricole, il lui arrive de venir au sol. Son régime alimentaire se compose principalement de feuilles (il raffole des jeunes pousses et des bourgeons), puis de fruits, de graines, de fleurs, d'écorce et de moelle. Il ne boit pas, l'eau qu'il ingère provient uniquement de sa nourriture grâce à son système digestif complexe lui permettant d'extraire les éléments nutritifs essentiels.
Clouded tiger
Pygathrix nemaeus vit souvent par groupe mixte de quatre à dix-huit individus, parfois jusqu'à cinquante individus mixtes. Il vit en société modulaire caractérisée par la fission-fusion de plusieurs unités unipersonnelles qui se rassemblent et se divisent quotidiennement. Pour communiquer, il dispose d’une panoplie d’expressions faciales, combinée de grognement grave en guise de menace, et d’un cri de détresse court et rude. Les mâles et les femelles disposent de leurs propres hiérarchies et les mâles dominent les femelles. Généralement ces individus ne restent pas dans leur groupe de naissance.

Aujourd’hui en danger critique d'extinction, Pygathrix nemaeus est soupçonné d'avoir subi un déclin de plus de 80 % au cours des trois dernières générations (trente-six ans), en raison de l’empiètement et la perte de forêt sur son aire de répartition dues aux barrages, au développement d’infrastructures routières, de plantations agricoles, d'exploitation minière et à la chasse intensive pour le commerce lucratif d'espèces sauvages. Toutefois, grâce aux efforts de GreenViet Biodiversity Conservation Centre - une organisation locale à but non lucratif créée en 2012 - et d'autres défenseurs de l'environnement, la population de Pygathrix nemaeus sur la réserve naturelle de Son Tra est de nouveau en croissance depuis quelques années.

L’observation de ces spécimens en pleine jungle peut s’organiser depuis le prestigieux InterContinental Danang Sun Peninsula Resort. Cette oasis imaginée par le renommé architecte Bill Bensley se fond dans un écrin de palmiers tropicaux foisonnant les pieds dans l’eau. Il comprend cent quatre-vingt-neuf chambres, suites, penthouses et villas, toutes élégamment décorées dans un style vernaculaire vietnamien, suivant une palette de teinte thématique fluctuant du noir du bois laqué, au blanc des tuiles des temples emblématiques, mêlée de couleurs judicieusement placées et d’œuvres d'art uniques, avec une vue imprenable sur la mer azurée de l’Est. En somme, un centre de villégiature de classe mondiale, au service et design sans commune mesure, qui sonne comme une référence dans le monde de l’hôtellerie de prestige.

LÉGENDES

- Bannière : le douc à pattes rouges, par Eric Losh.
- Photo : deux pygathrix nemaeus du Centre de Sauvetage des Primates en voie de disparition de Cuc Phuong, par Joel Sartore.
- Illustration : le douc à pattes rouges, Collection Abecasis Science.


 
Une penthouse de l'InterContinental Danang Sun Peninsula Resort
 
LE HSIENMU
UN ROI DES HAUTEURS CALCAIRES
 
Lors des diverses missions Ke Bang 2024, une des merveilles observées est le hsienmu. En cette édition hivernale, nous abordons cette essence précieuse des hauteurs calcaires d’Asie du Sud-Est.

Le hsienmu est un arbre majestueux, rare, disséminé sous la forme de bois localisés. Il se plaît sur les massifs karstiques du centre et nord Vietnam, du nord-est Laos et du sud de la Chine. Il se caractérise par son écorce fendillée, ses puissantes racines tentaculaires et ses qualités pour la construction.

Depuis une trentaine d’année, il est menacé par la perte de son habitat. Depuis 1998, il est classé dans la Liste Rouge de l'UICN des espèces menacées et également classé vulnérable selon les critères A1cd. Au Vietnam, diverses actions de conservation sont en cours, notamment dans le parc national de Ba Be et dans celui de Phong Nha – Ke Bang.

Le hsienmu (Burretiodendron hsienmu, le Nghien des Vietnamiens) est classé dans la sous-famille des Dombeyoideae, de la famille des Malvaceae. Il affectionne les forêts tropicales et subtropicales humides, à des altitudes allant de 500 à 1500m et croît sur des sols karstiques bien drainés. Il nécessite un climat chaud et humide pour prospérer et s’est adapté à des milieux aux températures modérées à élevées et à forte humidité, à l’instar des sommets brumeux du Phu Tha Ca et de ceux des parcs nationaux de Ba Be et de Phong Nga – Ke Bang.

Le hsienmu peut atteindre des hauteurs de 30 à 50m pour un diamètre d’une moyenne de 80 à 90cm, parfois plus pour les vieux spécimens (vers 3m50). Certains peuvent atteindre un âge de 1000 et 2000 ans pour certains spécimens vénérables, notamment dans la forêt du district de Ha Lang, dans la province de Cao Bang (Nord-Est Vietnam) et dans la réserve naturelle de Gulinqing (Sud Yunnan).

Son tronc est droit et robuste, avec une écorce grise à brunâtre, parfois fissurée. Les jeunes branches sont glabres. Les feuilles sont ovales, mesurant environ 12cm de long sur 10cm de large, avec un bord entier. Elles présentent 5 à 7 paires de nervures latérales, dont 3 partent de la base ; le pétiole des feuilles mesure de 3 à 5cm de long.
Hue Citadel
Les fleurs sont unisexuées. Les fleurs mâles ont un diamètre d'environ 1,5cm. Le calice est en forme de cloche, divisé en 5 lobes profonds, mesurant 1,5cm de long. Les pétales sont au nombre de 5, mesurant 1,3cm de long. Il y a environ 25 étamines, regroupées en 5 faisceaux ; les filets des étamines mesurent de 1 à 1,3cm de long ; les anthères sont oblongues, mesurant 3mm de long. Le fruit est pentagonal (semblable à un fruit de pêcher), s'ouvrant naturellement, avec un diamètre de 1,8cm, il mûrit en fin d'été ou en automne.

Le hsienmu produit des fruits et des graines qui servent de nourriture à une variété de créatures forestières. Les oiseaux, les petits mammifères, et même certains insectes se nourrissent de ces graines, contribuant à leur dispersion. Les fruits, souvent riches en nutriments, attirent de nombreux herbivores et omnivores, établissant ainsi l'arbre comme une source de nourriture essentielle. L'écorce, les feuilles et le bois du hsienmu hébergent une multitude d'insectes. Ces insectes, à leur tour, attirent des prédateurs comme les oiseaux insectivores et les petits reptiles. En fournissant un habitat et une source de nourriture pour ces insectes, l'arbre soutient indirectement les niveaux trophiques supérieurs.

Les feuilles mortes, les branches et les autres parties végétatives de l’hsienmu, une fois tombées au sol, sont décomposées par une variété d'organismes décomposeurs, comme les champignons, les bactéries et les insectes saprophages. Ces décomposeurs transforment la matière organique en nutriments disponibles pour les plantes, fermant ainsi le cycle des nutriments dans la forêt. Ses racines profondes et étendues aident à stabiliser le sol et à prévenir l'érosion. En fixant le sol, l'arbre contribue à maintenir la structure du terrain forestier, protégeant ainsi contre les glissements de terrain et l'érosion due aux fortes pluies de la mousson.

En tant qu'arbre de grande taille, le hsienmu joue un rôle crucial dans la régulation du microclimat forestier des monts calcaires du centre et nord Vietnam. Son feuillage dense procure de l'ombre, modérant ainsi les températures au sol et réduisant l'évaporation. Il absorbe le dioxyde de carbone de l'atmosphère et le stocke sous forme de biomasse. Cette fonction de séquestration du carbone aide à atténuer les effets du changement climatique en réduisant la concentration de gaz à effet de serre dans l'atmosphère de ces régions.

Le bois du hsienmu possède des propriétés mécaniques élevées, étant très dur, résistant, durable, sans veines, et imperméable aux insectes et aux champignons, même lorsqu'il est enterré dans le sol. Les intempéries ne peuvent que ternir la surface du bois exposée. Son cœur a une couleur uniformément brun foncé, avec des anneaux de croissance très fins et une structure en couches. Sur le plan mécanique, il est dur, solide et très résistant. Lorsqu'il est poli, les parties plus anciennes peuvent révéler des motifs subtils similaires aux motifs sur la lame d'un sabre japonais (ceci est dû à sa structure en couches, également appelée grain de chun, que seuls quelques types de bois possèdent).

Dong KhanhLes habitants des régions montagneuses calcaires élevées du Vietnam, principalement les Tây, les Hmông et les Nung, utilisent le hsienmu pour construire leurs maisons, y compris les poteaux, les planchers, les poutres transversales, les poutres principales, et autres éléments. Une caractéristique spécifique de ce bois est que lorsqu'on marche sur le plancher, il ne produit jamais le bruit caractéristique du bois mou ou flexible, c’est pourquoi ce bois est très apprécié pour la fabrication de planches. Il est pareillement utilisé pour constituer des cloisons, les étagères, les tables et les chaises. Les nœuds de son tronc (les parties noueuses ou les excroissances boisées qui se forment lorsque le tronc de l'arbre est blessé ou présente une anomalie) ont une surface rugueuse mais sont constitués de bois dur, avec une variété de couleurs et des motifs de nœuds esthétiques. Ils sont utilisés pour la fabrication d'artisanat décoratif comme des sculptures, des vases et des décorations.

Sur demande, divers modules Secret Indochina sont organisables pour observer le hsienmu dans son milieu naturel, notamment dans les parcs nationaux de Phong Nha – Ke Bang, de Ba Be et au Phu Tha Ca, ce depuis le village hmông blanc de Seo Lung d’où des randonnées forestières prennent racines dans la vallée centrale de ce massif brumeux, second point culminant de la province de Ha Giang
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LÉGENDES

- Bannière : feuille de hsienmu.
- Photo n°1 : hsienmu centenaire (Cao Bang).
- Photo n°2 : hsienmu millénaire (réserve naturelle de Gulinqing, Chine).


 
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